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On constate année après année une disparition rapide des chemins et sentiers sur l'ensemble du territoire français. Cette perte se fait de trois façons :
- La disparition physique du chemin, par les remembrements, la vente aux particuliers par des communes, la clôture plus ou moins légale de certains domaines privés, le manque d'entretien.
- La transformation de l'ancien chemin qui en enlève toute saveur pour le marcheur : arasement des haies pour en faire un large chemin d'exploitation, goudronnage pour faciliter la circulation des véhicules, goudronnage pour relier à la plus proche route une habitation secondaire, empierrement en gros appareil pour le passage des engins agricoles, création d'une nouvelle piste carrossable (zone de montagne) entrainant l'abandon de l'ancien sentier.
- L'interdiction de passage de certains propriétaires fonciers, que ce soit des privés ou des administrations (domaines forestiers).
Ainsi, le GR 65, entre Le Puy-en-Velay et Saint-Jean-Pied-de-Port, devient de plus en plus étiolé, ressemblant à une suite ininterrompue de chemins d'exploitation, de routes de fermes, de routes départementales, formant des zigzags quelquefois surprenants.
A l'approche des villes et villages, c'est systématiquement des km de goudron, car les lotissements et les maisons isolées sont systématiquement rattachés au réseau goudronné.
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De plus en plus, le "chemin" de Saint-Jacques devient la "route" de Saint-Jacques.
On marche en certains endroits sur des kilomètres de route, alors que s'étendent de chaque côté des milliers d'hectares de forêt. N'y aurait-il pas quelques mètres pour y glisser un sentier ?
Plus grave : certains créateurs de sentiers, et certains pèlerins se satisfont de cette situation, arguant qu'il est même plus agréable de cheminer sur une petite route (qui est toujours "tranquille", à leurs dires) que sur un chemin boueux...
On a presque totalement oublié, sauf en zone de montagne, le plaisir de marcher des heures entières sur un vrai chemin de terre, où le piéton est à sa vraie place, les routes étant réservées aux véhicules motorisés.
On a oublié aussi que si le chemin est boueux ou en mauvais état, c'est parce que plus personne, depuis 150 ans, ne l'entretient plus... Car un chemin, tout comme une route, se dégrade lentement.
La randonnée, et spécialement la randonnée sur le chemin de Saint-Jacques, se déroule aujourd'hui dans un environnement qui ne prévoit plus rien pour les piétons, qui n'est pas fait pour eux.
Tout ce passe comme si un sentier de randonnée, désormais, devait se contenter des miettes que lui laissent les autres cheminements.
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Pourquoi ne pas créer, à l'imitation du Conservatoire du Littoral, un Conservatoire des Chemins de Saint Jacques ?
Sa mission serait de recréer un vrai sentier par tous les moyens : rachat d'emprises foncières, passage de conventions, création de tracé en domaine forestier ou rocheux, etc..., afin de créer un itinéraire piétonnier et continu, excluant tout revêtement moderne fait pour des véhicules, du Puy-en-Velay aux Pyrénées.
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La FFRP, en réfléchissant à l'avenir des sentiers dans les années 1990, avait déjà évoqué l'achat de sentiers pour en préserver l'avenir.
Le sentier, étant une propriété privée ou relevant du domaine public (comme les terrains côtiers acquis par le Conservatoire du Littoral) deviendrait inaliénable et incessible, un cadeau faitt aux générations à venir.
La structure juridique d'un Conservatoire des Chemins de Saint-Jacques pourrait être calquée sur celle du Conservatoire du Littoral, ou inspirée du modèle britannique (fondation privée alimentée par le mécénat).
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Oser un pari fou : le tourisme à pied, au long cours, sur des itinéraires réservés à cet usage exclusif. Avec en arrière-plan cette image des richesses du terroir, et aussi pour tous des images d'enfance : le cheminement, l'itinérance, la fontaine, la forêt...
La reconstruction d'un chemin de Saint-Jacques pourrait être un laboratoire de techniques anciennes remises au goût du jour.
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Ce pourrait être l'apprentissage pour des milliers de jeunes des métiers du tourisme, du bâtiment traditionnel.
Ce serait une vitrine dynamique de notre pays, capable d'entreprendre un chantier aussi révolutionnaire. Et une image de marque qui rayonnerait dans le monde entier.
Un tel chantier s'étalerait probablement sur une trentaine d'années.
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La création d'un sentier aujourd'hui ne répond plus aux mêmes critères que ce qui prévalait autrefois.
Le sentier étant un axe économique reliant deux villages, on le faisait passer par le tracé le plus facile, le plus rapide et le plus protégé des éléments naturels et des larrons. On construisant sur du plat, sur les crêtes. De nos jours on n'a plus peur des forêts et des fonds de vallée.
On peut donc imaginer pour un nouveau chemin un tracé totalement libre, en fonction de la topographie des lieux, des acquisitions de terre, des relations avec les propriétaires ou les communes, de l'esthétisme des endroits, etc...
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Il existe des versants raides totalement inexploités et sans aucun chemin, puisqu'il n'y avait pas utilité autrefois à en tracer à cet endroit, mais qui pourraient être équipés aujourd'hui afin d'éviter les multiples routes qui desservent les plateaux.
Et en respectant scrupuleusement le paysage, en évitant les "saignées" visibles à des kilomètres que font certaines voies tracées à coup de bulldozers.
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La construction d'un sentier fait appel à différents métiers :
- maçon (petits ouvrages d'art, abris sommaires)
- tailleur de pierre
- pontonnier (ponts et passerelles)
- muretier (murets de soutènement en pierres sèches, murets bordant le chemin)
- fontainier-puisatier (aménagement des sources)
- paysagiste (plantation d'arbres et de haies)
- artificier : explosifs légers pour les zones rocheuses |
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Les derniers sentiers créés en France sont certains chemins muletiers taillés en montagne au 18ème et 19ème siècles. A cette époque on utilisait déjà l'explosif pour creuser la roche.
La création d'un sentier quasiment de toutes pièces présente des contraintes bien moindres que celles d'une voie routière. Le respect de la pente est relatif et s'adapte au relief. La largeur est faible puisque faite pour des piétons. Le détour obligatoire à cause d'un obstacle n'est plus un problème. Les ouvrages d'art, n'ayant pas à supporter de véhicules, peuvent être plus petits.
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Créer un sentier demande de faire appel à des techniques anciennes comme à des technologies modernes :
Techniques anciennes :
- Ponceaux pour laisser s'écouler les sources.
- Construction de murets de soutien.
- Ponts voûtés. |
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Techniques modernes :
- En zone de faible pente, le terrassement peut se faire avec des mini-pelles mécaniques, et non plus à la main.
- Si on rencontre des roches, les explosifs modernes permettent d'en venir à bout rapidement et sans danger.
- Le transport des matériaux (pierres, chaux) peut se faire avec des quads et non plus à la brouette ou à dos de mulet. |
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On trouve différents types de revêtements sur un sentier.
- calladé : pierres debout calées les unes contre les autres, remplissage de terre et gravillons : réservé aux fortes pentes.
- escalier : réservé aux ruptures de pente ou pentes très fortes.
- pavés plats : réservé aux endroits où un passage fréquent pourrait éroder trop vite (croisement avec un chemin agricole ou un passage d'animaux).
- terre ou mélange terre-chaux-gravillons : réservé aux endroits assez plans, à l'ombre
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- herbe fauchée : réservée aux endroits assez plats, au soleil
A éviter à tout prix ce qu'on rencontre aujourd'hui sur certains chemins humides : l'empierrement avec du tout-venant posé en vrac, qui laisse à la surface du chemin un lit de pierres piquantes.
Etudier une pente standard qui permette de marcher sans fatigue pour toute personne, d'éviter l'érosion des sols par ravinement, et aux petits engins d'entretien de monter sans danger.
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Un chemin de Saint-Jacques créé de toutes pièces a vocation seulement à accueillir des marcheurs. C'est donc un sentier et non un chemin.
Il doit accueillir vélos et VTT à condition que ceux-ci respectent les règles élémentaires de prudence et de courtoisie.
On peut également admettre le passage d'un animal de bât, âne ou mulet. Faut-il interdire les chevaux, dont les sabots détériorent rapidement le revêtement ?
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On peut également accepter que passent ici en sécurité des attelages légers pour personnes handicapées (attelés à des ânes).
Doivent être bannis totalement tous les engins à moteur, mobylettes, motos tout-terrain, quads.
Compte-tenu de ces contraintes, le chemin doit avoir partout la même largeur. 1.30 m permettrait à deux personnes de cheminer côte à côte et à un animal bâté de passer sans problème.
L'emprise du chemin doit comprendre une bande de part et d'autre pour laisser prospérer la végétation, et assurer de l'ombre au marcheur. Voire empêcher une destruction par un riverain peu scrupuleux.
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On trouvait autrefois sur les chemins à intervalles réguliers des fontaines et des sources aménagées, afin que hommes et animaux puissent s'abreuver. |
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Tous ces équipements sont disparus par manque d'entretien, après la mécanisation de l'agriculture.
On pourrait remettre à l'honneur les techniques de captage d'une source, de création de bassins, de filtrage des eaux.
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Historique : en certains endroits, la puissance publique a investi dans le tourisme pédestre en créant de toutes pièces des voies spécifiques. En Vendée c'est une piste cyclable au long du littoral. En Navarre et Galice on a exproprié de légères bandes de parcelles privées pour créer un cheminement à l'abri des véhicules et y faire passer les pèlerins.
L'idée n'est donc pas nouvelle, mais elle n'a jamais été réalisée sur un itinéraire au long cours impliquant de multiples acteurs (régions, Etat, départements, communes, ONF, etc...).
Si un passage d'animaux domestiques traverse le sentier, il faut prévoir des barrières canadiennes ou encore des barrières qui se referment seules, permettant ainsi au marcheur de suivre l'itinéraire avec la certitude que des animaux ne s'échapperont pas.
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Si le sentier à créer longe un champ avec une haie, prévoir que la haie (plus une bande de deux ou trois mètres au-delà) fasse partie de l'acquisition, ce qui permet de lancer des chantiers sur le bois : coupe, taille, têtards, confection d'une haie, valorisation des déchets de coupe (broyage ou briquettes ou compost).
Mais éviter certaines erreurs trop flagrantes qui ont été faites en Espagne (dessiner un chemin à 5 m de la route....).
On peut imaginer une sorte de "convention" entre le Conservatoire et une commune ou l'ONF sur un chemin existant, faisant en sorte que ce chemin soit transformé selon le standard, nettoyé, puis entretenu et géré entièrement par le Conservatoire. Ce qui exclut totalement son utilisation par des véhicules ou engins agricoles.
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Le lancement d'un tel projet et sa durée permettrait d'envisager sur le long terme une grande politique d'embauches à caractère social : emplois aidés, insertion, jeunes en difficulté, stages pour étrangers, etc... |
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Faire appel aux écoles professionnelles et aux Compagnons du Tour de France pour les ouvrages d'art. |
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L'Unesco a classé certaines portions et certains monuments du Chemin de Saint-Jacques "Patrimoine de l'Humanité".
L'Union Européenne l'a déclaré "Premier Itinéraire Culturel Européen".
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Les régions et les départements sont conscients aujourd'hui de l'impact du Chemin de Compostelle sur leur image et leur économie.
Un tel projet, cadré sur le long terme et la qualité, porteur d'un beau rêve, devrait donc obtenir des subventions conséquentes.
Sous une forme de Fondation, elle pourrait recevoir des dons et legs de personnes privées, de mécènes.
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La structure administrative doit être suffisamment étudiée pour assurer la pérennité de l'oeuvre dans le temps.
Elle peut être publique, privée ou mixte, mais avec des organes de surveillance (Conseil d'administration, Commissariat aux Comptes) permettant d'utiliser d'une manière optimale l'argent collecté et d'éviter tout détournement.
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Elle serait située en amont des structures existantes, mais elle doit maintenir un lien étroit avec les intervenants actuels du Chemin de Saint-Jacques (FFRP, associations jacquaires).
Elle doit être légère pour garder l'efficacité et empêcher les freinages dans l'action.
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Jusqu'à la fin du 19ème siècle, les chemins publics qui servaient à la circulation des marchandises étaient entretenus par des cantonniers. Depuis la création des nouvelles routes et l'introduction du revêtement à base de goudron, cet entretien a cessé totalement.
Nombre de sentiers de randonnée, surtout en zone de relief, sont dans un tel état de délabrement qu'aucune caravane de mulets ne pourrait plus s'y risquer sans danger. Or on y voit des marcheurs s'y casser gaillardement la figure, sans imaginer que l'infâme éboulis sur lequel ils glissent fut 120 ans auparavant un chemin parfaitement entretenu où passaient chaque jour des centaines de personnes et de bêtes de somme.
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Le chemin se détériore vite : éboulements, ravinement par la pluie, inondation, effondrement, arbres abattus, envahissement par la végétation, etc...
Les techniques d'entretien se sont perdues et doivent être retrouvées dans les archives communales ou celles de la Direction de l'Equipement (anciennement Ponts et Chaussées)
Pour assurer l'entretien, on peut imaginer la création d'emplois de cantonniers tous les "x" km, avec un cahier des charges précis et un calendrier rigoureux.
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