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Stevenson 2025 : le guide Miam Miam Dodo raconté par son autrice

Stevenson 2025 : le guide Miam Miam Dodo raconté par son autrice

Depuis le 5 février, le guide Miam Miam Dodo actualisé des Chemins de Stevenson & Saint-Gilles (Régordane) est disponible ! Rendu célèbre par un jeune écrivain écossais au XIXe siècle, Robert Louis Stevenson, ce chemin de randonnée à travers les Cévennes a retrouvé son rayonnement d’antan depuis une trentaine d’années. Pour finir de vous convaincre de le parcourir, nous avons rencontré Marie-Virginie Cambriels, l’autrice du guide Miam Miam Dodo qui lui est consacré aux Editions du Vieux Crayon. 

               

Marie-Virginie, tu es bien connue des hébergeants sur le chemin avec qui tu échanges chaque année au moment de la mise à jour du guide, mais peut-être moins de nos lecteurs. Peux-tu te présenter à eux ? 

Bonjour, chers lecteurs, je suis d’abord pèlerine des chemins de Saint-Jacques, que j’ai parcouru seule à l’âge de vingt ans, puis avec un âne (Pompon) et en musique, en faisant des concerts tout au long de la route entre le Puy-en-Velay et Saint-Jacques-de-Compostelle, avec une autre amie musicienne (je suis moi-même chanteuse et flûtiste). Ces cheminements m’ont invitée à une première expérience éditoriale avec la publication de mon récit de voyage (Un chemin d’étoiles, éditions Orion), puis d’un carnet de chansons de pèlerins. Je suis aussi allée à Rome à vélo et à Jérusalem en partie à pied à partir d’Antioche. Quelques années plus tard, Jacques Clouteau, qui connaissait mon parcours, m’a proposé de collaborer avec les éditions du Vieux Crayon, tout d’abord pour le Miam-Miam-Dodo du Camino Francés. Dès la sortie de la première mise à jour de ce guide, j’ai eu l’idée de faire un autre guide dans cette même collection, sur des chemins plus proches de chez moi. C’est ainsi qu’est née l’idée du Miam-Miam-Dodo des chemins de Stevenson et de Saint-Gilles ou Régordane.

Quel est ton lien avec le chemin de Stevenson ?

Je vis au Puy-en-Velay, et j’ai donc tout d’abord un lien géographique avec cet itinéraire. En effet, de même que Robert Louis Stevenson était d’abord arrivé au Puy en train par la ligne venant de Saint-Etienne, très nouvelle à son époque, pour aller ensuite séjourner au Monastier,  le chemin de R.L. Stevenson est aujourd’hui balisé à partir de la gare du Puy-en-Velay. 

D’autre part, ayant moi-même randonné « au long cours » avec un âne, j’avais un lien personnel particulier avec cet écrivain, sa Modestine et son récit de voyage à travers les Cévennes. D’un côté, c’était une référence obligée, une sorte de prédécesseur lointain mais encore auréolé de gloire, d’un autre, j’avoue que j’étais un peu jalouse de son aura. Après tout, il n’avait marché que douze jours, un parcours bien modeste par rapport à mon trimestre musical et pérégrin au pas de Pompon. Mais en le « fréquentant » davantage pour l’écriture de mon guide, ainsi que sa Fanny, j’ai le sentiment que nous sommes finalement devenus, par-delà les années qui nous séparent, de bons amis. 

                                                        

Tu as donc parcouru ce fameux chemin dans son intégralité ? Quel est ton meilleur souvenir ?

Oui, je l’ai parcouru en plusieurs sections, car j’avais des contraintes de temps liées à l’écriture de ce guide. Le sommet en fut, naturellement, émotionnellement et géographiquement, le même que celui de Stevenson, le Mont Lozère, qui culmine à presque 1700 mètres d’altitude et offre un panorama à 360°. J’en apprécie aussi particulièrement la partie plus méridionale, car les merveilleux paysages du Velay et de la Margeride sont ceux de mon quotidien, et je n’y éprouve donc pas ce sentiment joyeux propre à la randonnée, ce sentiment qu’un nouveau pays s’invente et s’ouvre au fil de mes pas.

Quelle est donc précisément l’histoire de ce chemin et son lien avec l’écrivain R L Stevenson que tu as évoqué ?

En 1878, Robert Louis Stevenson, jeune écrivain écossais, alors à ses débuts, après d’autres voyages pittoresques en voilier ou en canoë, et dans une situation sentimentale difficile, se rend dans la petite bourgade vellave du Monastier-sur-Gazeille. Il y séjourne trois semaines au cours desquelles il se promène et écrit beaucoup. Il a choisi ce lieu tout à fait improbable à cause d’une référence littéraire à un roman oublié de George Sand (qu’il adorait), Le Marquis de Villemer, qui se déroule en partie au Monastier et alentours. L’héroïne de ce roman se trouve dans une situation sentimentale proche de celle de l’écrivain à cette période. Il cherche à retrouver les lieux du roman et sa joie est complète lorsqu’il rencontre un paysan qui avait rencontré George Sand elle-même vingt ans auparavant, lorsqu’elle était venue en ces lieux se documenter pour préparer son roman. 

« Ce chemin est un peu plus exigeant physiquement que le chemin de Saint-Jacques. »

Mais il a un autre objectif, comparable à celui de la bonne Dame de Nohant : se rendre au pays des Camisards, c’est-à-dire dans les Cévennes, pour se documenter et écrire un livre à ce sujet. En effet, l’histoire des Camisards est fondatrice pour le protestantisme, et très étudiée dans les pays et régions protestants, comme l’Ecosse. Il achète donc une ânesse, Modestine, s’équipe pour pouvoir partir avec elle en autonomie (faisant faire pour lui le premier sac de couchage en peau de mouton) et part à pied du Velay vers les Cévennes jusqu’à Saint-Jean-du-Gard et Alès. Il racontera et éditera son Voyage avec un âne à travers les Cévennes, premier succès littéraire du futur auteur de L’Île au Trésor et de Dr Jekyll and Mr Hyde.

Assez rapidement, sur les traces de l’écrivain, certains de ses lecteurs s’élanceront à leur tour sur ses traces, à pied ou par d’autres moyens. Fait peu connu : Fanny Stevenson, devenue veuve (en 1894), vint elle-même en France parcourir ce chemin en voiture au début du XXème siècle. En 1978, pour le centenaire du voyage de Robert Louis, le Club Cévenol a balisé ce chemin. En 1993, la Fédération de Randonnée Pédestre a poursuivi ce travail en le labellisant chemin de Grande Randonnée (GR). 

Depuis 30 ans, une association, Sur le chemin de Robert Louis Stevenson, fédère un réseau et des actions pour le promouvoir. Peux-tu nous la présenter ?

En 1994, une poignée d’hébergeurs au long de ce chemin, particulièrement sensibles à l’accueil des randonneurs, se sont regroupés pour essayer de promouvoir cet itinéraire à travers l’association Sur le chemin de Robert Louis Stevenson. Trente ans plus tard, plus de deux cents hébergeants et d’autres prestataires de service l’ont rejointe. Elle a plusieurs missions : celle d’assurer un lien entre eux, de les mettre en réseau, de renseigner les randonneurs en partance, de contribuer à la promotion de ce chemin et de son patrimoine.

En 2015, il a même été reconnu comme itinéraire culturel du Conseil de l’Europe, avec le réseau européen Sur les pas de Robert Louis Stevenson, qu’est-ce que cela signifie ?

Robert Louis Stevenson, malgré sa santé fragile, a énormément voyagé, et marqué de sa présence, de son passage ou de ses écrits plusieurs territoires. Ceux-ci ont progressivement tissé des liens et des projets communs, et comme cet écrivain voyageur est, par son parcours atypique à son époque, particulièrement « européen », l’idée a progressivement germé d’obtenir une reconnaissance comme itinéraire culturel européen. Si les Chemins de Saint-Jacques sont le premier de ceux-ci en 1987, il faut savoir que tous les itinéraires ne sont pas des chemins de randonnée. Il y a, par exemple, un itinéraire culturel autour de Mozart, un autre autour de la vigne, de Le Corbusier, des Vikings, etc. Cet itinéraire Sur les Pas de Stevenson comporte des chemins en tant que tels, comme celui des Cévennes ou le Stevenson Way écossais (qui reprend l’itinéraire du héros Stevensonien David Balfour l’Ouest en Est de l’Ecosse), et des lieux où l’écrivain a vécu ou séjourné, comme Edimbourg, bien sûr, mais aussi Paris, Fontainebleau, Grez-sur-Loing et ses colonies artistiques où il rencontra Fanny, Menton, Hyères, etc. Un ouvrage tout récent, paru chez Gallimard, Sur les chemins de Stevenson, fait découvrir ce réseau et ces territoires marqués par l’écrivain voyageur.

                                   

Parlons randonnée, combien de temps faut-il pour effectuer le chemin de Stevenson ? Est-il difficile ? A qui s’adresse-t-il ?

Stevenson a parcouru ce chemin en douze jours. Les plus sportifs (ou les plus pressés) pourront le faire en neuf ou dix jours, ceux qui veulent savourer leur itinéraire pourront prendre deux semaines. Ce chemin est un peu plus exigeant physiquement que le chemin de Saint-Jacques. En effet, si un chemin de pèlerinage essaie par nature d’aller le plus droit possible au but (avec des compromis pour éviter le goudron et les voitures), Stevenson est allé « à saut et à gambades » d’un lieu pittoresque à l’autre sans craindre le dénivelé… et le balisage comme GR a encore accentué cela ! D’autre part, il monte jusqu’à presque 1700 mètres, au sommet de ce fameux Mont Lozère, où l’on peut se laisser surprendre par neige ou brouillard même en juin ou en septembre !

A côté du chemin de Stevenson, gravite également le chemin de Saint-Gilles ou Régordane. Sa particularité est de rejoindre cette petite ville un peu oubliée aujourd’hui de Saint-Gilles-du-Gard. Quelle est l’histoire de cet itinéraire ?

 

Saint-Gilles, ente Arles et Nîmes, fut au Moyen Âge, une cité particulièrement rayonnante. L’abbaye de Saint-Gilles était l’objet d’un pèlerinage aussi prestigieux que celui de Compostelle à certaines époques (en particulier au XIIe siècle). D’autre part, avant Aigues-Mortes, ce fut un port de Méditerranée extrêmement important sur le Rhône, autrefois navigable jusque-là. A l’instar des chemins de Saint-Jacques, qui sont nombreux, il y eu plusieurs chemins de Saint-Gilles, à la fois chemins de commerce vers le port, et chemins de pèlerinage vers l’Abbaye. Celui qui, passant par le Puy, descend vers Alès et Saint-Gilles, a gardé aussi le nom de chemin de Régordane, nom mystérieux sans doute lié à une ancienne seigneurie ou territoire disparu, que l’on voit apparaître dans les légendes épiques. Il se trouve que Stevenson a croisé (sans le savoir) cette Régordane en plusieurs étapes ! D’autre part, c’était aussi un chemin de muletiers. Il m’a donc paru tout naturel de présenter dans un même ouvrage le chemin des Régourdiers et celui de Modestine !

« L’âne est un compagnon de route à part entière. S’offre alors à vous une merveilleuse aventure partagée avec un complice très attachant, que je recommande tout particulièrement si vous souhaitez randonner avec des enfants. »

Stevenson et Saint-Gilles sont-ils très fréquentés ? Quelle est la meilleure période pour y randonner : que nous conseilles-tu ? 

Ce chemin de Saint-Gilles ou Régordane n’a pas encore retrouvé son aura d’autrefois. Il est pour vous si vous aimez la tranquillité… ou si les gîtes sont déjà complets sur le chemin de Stevenson… ce qui arrive à certaines périodes ! ou encore si vous préférez un chemin un peu moins exigeant physiquement.

Pour randonner, la période de Pâques à Toussaint s’impose, d’autant que de nombreux gîtes sont fermés en dehors de cette période (mais vous pouvez bien sûr consulter le Miam-Miam-Dodo pour en savoir plus). La traversée du Velay comme celle de la Margeride, et les contre-hauts du pays Camisard, en altitude, peuvent se faire en été sans craindre une chaleur trop forte. Les mois les plus fréquentés, en tous cas sur le chemin de Stevenson, sont mai, juin et septembre.

A pied ou avec un âne alors ?

C’est un choix qui dépend du contexte. En tous cas, si vous considérez l’âne comme un simple porte-bagage, il vaut mieux s’adresser à des agences professionnelles de transport de bagage. C’est un compagnon de route à part entière. Si vous l’acceptez en tant que tel, s’offre à vous une merveilleuse aventure partagée avec un complice très attachant, que je recommande tout particulièrement si vous souhaitez randonner avec des enfants. 

Que dirais-tu à ceux qui hésitent à se lancer sur ces chemins ? 

Je leur chanterai un refrain aimé de Stevenson « Over the hill and far away » : « là-haut sur la colline et au lointain »…

Un Grand merci Marie-Virginie pour cet échange. Le guide Miam Miam Dodo 2025 Chemin de R L Stevenson (GR®70) et Chemin de Saint-Gilles (GR®700 – Régordane) est disponible dans notre boutique. Prix public : 20 €, 13,50 x 21 cm, 208 pages, 240 g.

 

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